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contis plage


 
Un long voyage ...
24/12/2006

Témoignage de Gilles REVERDIN
Directeur de projet à l'Université de Paris VI

La bouée récupérée en décembre 2005 par ContisPlage.com avait été mise à l’eau le 1 avril 2005 dans le cadre d’un projet destiné à terme à mieux mesurer la salinité des eaux de surface océanique et à en comprendre son évolution.

Bouée météo

Depuis la création des océans, lorsque la terre était encore jeune, les eaux océaniques sont salées, c'est-à-dire qu’elles contiennent des ions hydratés, qui, une fois l’eau de mer évaporée, constituent la plus grande part de ce que l’on appelle le sel de mer. Ces ions ont une concentration qui varie d’un point à l’autre du globe sous l’effet d’apports d’eau douce (la pluie, les eaux des rivières) ou de retrait de cette eau douce (l’évaporation à la surface de l’océan). Cette concentration est classiquement désignée sous l’appellation de « salinité ».  Mesurer l’évolution de la salinité des eaux océanique proches de la surface peut ainsi être une façon d’estimer les variations de ces échanges d’eau douce, qui sont difficilement mesurables précisément directement en mer.

Par ailleurs, la salinité influe fortement sur la densité de l’eau de mer (une eau salée est plus dense, c'est-à-dire qu’elle occupe un moindre volume à poids égal, qu’une eau moins salée). Les variations de la densité des eaux de surface ont un impact sur les courants océaniques. En particulier, on pense qu’un adoucissement (moins de sel) des eaux atteignant le nord de l’Atlantique nord pourrait avoir un impact sur l’intensité du transport des eaux chaudes de surface des régions tropicales de l’Atlantique vers le nord de cet océan. D’après les modèles numériques de climat, les fluctuations de ces transports semblent jouer un rôle dans le climat de la planète et en particulier des régions d’Europe de l’ouest et du nord.

Bouée météo récupérée près de Contis

La salinité peut assez facilement être mesurée par des mesures de conductivité de l’eau de mer (les ions hydratés conduisent le courant électrique). Cette propriété a été utilisée dans le concept d’instruments dont sont équipés plusieurs véhicules dans l’océan (bouées diverses, bateaux, mouillages…). Par ailleurs, des efforts sont actuellement mis en œuvre pour développer au niveau international des instruments montés sur satellite permettant d’accéder à la salinité depuis l’espace et de façon automatique. Ces mesures sont basés sur le fait que dans certains domaines de fréquences l’émissivité de l’océan dépend de la conductivité de l’eau de mer.

Cet effet n’est jamais très fort, mais semble suffisant pour que deux missions spatiales aient été décidées afin de mesurer la salinité depuis l’espace (SMOS par l’Agence spatiale Européenne, dont le lancement est prévu en début 2008 ; AQUARIUS par les agences spatiales américaine (NASA) et argentine, dont le lancement est prévu en 2009). En appui à cet important effort, nous essayons de valider et de développer des bouées dérivantes équipées de capteurs permettant la mesure de la salinité, qui complèteront les autres observations de ce paramètre.

Bouée météo récupérée par ContisPlage.com

Les données de ces bouées sont transmises à un satellite qui assure aussi un positionnement relativement imprécis (mais à mieux d’un km, d’ordinaire) de la bouée. Afin de bien suivre l’évolution de la salinité, nous demandons à ce que la bouée donne une mesure au moins une fois par heure. Ces données sont parfois bruitées, et il faut faire un premier traitement pour en éliminer les données aberrantes. Heureusement, sur les instruments que nous utilisons, ce bruit reste quand même un phénomène isolé et les données incorrectes sont faciles à localiser.

Afin de valider ces mesures, nous avons déployé en 2005 (avril et mai) 15 bouées dans le Golfe de Gascogne de trois modèles différents. Celle qui est arrivé à Contis-plage était d’un modèle mis au point par le Scripps Oceanographic Institution (La Jolla, Californie). Ces bouées sont mises à l’eau d’un bateau, et sont alors équipées d’une ancre flottante flottant vers 15m d’immersion dans l’eau, afin que la bouée soit entraînée par ces courants de subsurface, ainsi que de capteurs pour la mesure de la salinité, de la température et de la pression atmosphérique.

Mesure de salinité

Toutes les données sont transmises publiquement afin de servir en temps quasi-réel aux services opérationnels, en particulier ceux des centres météorologiques, qui utilisent les données de pression atmosphérique afin de produire leurs prévisions météorologiques. La bouée 56362 (celle qui est arrivée sur votre plage) a ainsi été déployée le 1 avril par le navire océanographique français Thalassa. Elle a d’abord été prise par une structure tourbillonnaire (mouvement dans le sens des aiguilles d’une montre) pendant plus de deux mois, avant de dériver vers le sud près des côtes des Asturies. Là, après avoir eu une trajectoire vers l’ouest  qu’il l'a fait sortir du Golfe de Gascogne, elle est revenue vers l’est

En passant très proche des cotes des Asturies fin octobre, puis après une excursion au large, elle est revenue près des côtes en dérivant de nouveau vers l’est  dans des eaux moins salées jusqu’au pays basque. Elle a continué sa trajectoire le long du rebord du plateau vers le nord

Avant de pénétrer sur le plateau vers le 1 décembre vers 44°N et d’approcher de votre plage. Il est probable qu’elle avait perdu son ancre flottante, un peu plus d’un mois auparavant, et était fortement entraînée par le vent et la houle (conditions de vent d’ouest) lorsqu’elle s’est échouée. Ces trajectoires assez compliquées sont typiques de ce que l’on observe dans cette région où les courants moyens sont assez faibles, avec en particulier des courants tourbillonnaires au large et la présence de courants parfois intenses et fort variables le long des côtes du nord de l’Espagne.

Mesure des températures

Sur les figures, la couleur des trajectoires est indicatrice dans un cas de la température de l’eau de mer, et dans l’autre, de sa salinité. Pour la température, on voit principalement l’effet de l’évolution saisonnière avec des températures chaudes en juillet, août et se refroidissant au cours de l’automne (et de façon plus prononcée, début décembre, quand la bouée pénètre sur le plateau des Landes. Sur la salinité, on note des eaux plus salées au sud-ouest du Golfe de Gascogne que dans sa partie nord, et des eaux beaucoup moins salées (dans les bleus) quand on se rapproche des côtes nord espagnoles ou des Landes. Ceci montre l’impact de l’apport des eaux des rivières se déversant en mer dans ces parages (et pour les Landes,des fleuves Adour et de la Gironde).

 



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